Le spécialiste français de l’Amérique latine Hugues Kéraly a
donné de nombreux détails sur cette affaire, bien loin de la
désinformation sur l’émotionnel que les médias français ont choisi
d’utiliser.
Il s’avère que contrairement à ce qui est dit, à savoir que Florence
Cassez serait victime d’une justice mexicaine cynique et corrompue (le
Mexique, cette Russie d’Amérique du Sud ?), celle-ci aurait en réalité
visiblement commis des actes plutôt graves. Elle aurait en effet
rencontré, par l'intermédiaire de son frère, Sébastien Cassez, Israël
Vallarta Cisneros, présenté aujourd’hui comme le kidnappeur en chef d’un
gang très violent, le gang du zodiac ou Los Zodiaco. Israël Vallarta
serait suspecté d’enlèvements mais aussi de meurtre et est à ce jour
toujours incarcéré au Mexique.
Lors de leur arrestation en 2005 dans le ranch ou ils séquestraient
leurs prisonniers, la police avait découvert des armes et des munitions
de guerre, réservées aux forces armées, ainsi que trois otages enfermés
dans une petite dépendance de la propriété. Parmi les effets personnels
de Florence Cassez, la police mexicaine avait saisi une liste de 20 noms
et adresses de familles fortunées de la capitale.
L’une des trois otages était Cristina Ríos Valladares, enlevée le 19
octobre 2005 avec son mari et leur fils, et séquestrée avec son fils,
pendant 52 jours jusqu'au 9 décembre 2005. Dans une interview cette
victime oubliée des grands médias français déclare que son fils et elle
reconnaissent Florence Cassez comme leur ravisseuse grâce à sa voix et
son accent et que cette dernière a extrait du sang de l'enfant pour
l'envoyer au père et a menacé la mère de la tuer.
Alors que les parents de Florence n’ont pas hésité pour leur part à
mentir à la presse et au président de la République en affirmant qu’ils
ignoraient tout, eux aussi, des activités criminelles d’Israël Vallarta
Cisneros au point de ne l’avoir jamais rencontré, des photos publiées
dans la presse mexicaine (puis sur des blogs français) semblent au
contraire prouver les très joyeuses relations établies entre la famille
Cassez et le chef du gang.
Le
27 avril 2008, Florence Cassez avait été accusée de quatre enlèvements,
d’associations de malfaiteurs et de possession d’armes. Elle avait été
condamnée à 96 ans de prison mais la peine effective était en réalité de
20 ans. Le 3 mars 2009, Florence Cassez récolte de sa demande d’appel
40 ans de plus et se retrouve donc condamnée à 60 ans, la peine maximale
au Mexique.
En mars 2011, son avocat mexicain dépose un recours pour
inconstitutionnalité devant la Cour suprême du Mexique. Le 7 mars 2012,
quatre juges sur cinq reconnaissent effectivement des irrégularités de
procédure, mais seuls deux d’entre eux se prononcent pour libérer la
criminelle dont la culpabilité a été établie. Faute de majorité, une
nouvelle réunion est prévue. En janvier 2013, une proposition
d’annulation de la condamnation de la Française est de nouveau transmise
aux juges avec renvoi devant la cour d’appel. Mercredi 23 la Cour
examine l’affaire pour la seconde fois et libère Florence Cassez, sans
toutefois confirmer son innocence, puisque semblable à la Cour de
cassation française, la Cour Suprême du Mexique examine la forme des
affaires de justice et non le fond.
Elle s’est donc prononcée sur les vices de forme émaillant le dossier de la Française mais pas sur sa culpabilité.
La politique une nouvelle fois semble avoir été au cœur de l’affaire.
Le président Français, l’un des soutiens les plus actifs de Florence
Cassez, choisira de dédier l'année du Mexique en France (2011) à
Florence Cassez. Cela entrainera la colère du président du Mexique
Felipe Calderón qui annoncera le retrait du Mexique de ces
manifestations culturelles, entrainant l’annulation de l’événement. Coté
Mexicain, Hugues Kéraly affirme avoir discuté avec un jeune ancien
ministre du président Felipe Calderón qui lui aurait déclaré :
«
Florence Cassez ? On l’aurait bien laissé partir en France avant le
printemps 2011, conformément à la convention de Strasbourg que nous
avons imprudemment signée. Mais Sarkozy nous insulte. Delanoë nous
conspue. Alliot-Marie en rajoute des tonnes face à son Parlement. Ce
sont eux et personne d’autre qui viennent de condamner la petite
Française à perpétuité ! Vous devriez vous en ouvrir à notre ami commun
Nicolas Sarkozy, pour raisonner sa fougue, la prochaine fois qu’il
viendra prendre galamment de vos nouvelles, au téléphone, dans la
cellule de votre prison. »
Mais en décembre 2012, le très conservateur et intransigeant Felipe
Calderón (qui avait notamment fait campagne contre la criminalité) voit
lui succéder Enrique Peña Nieto.
Florence Cassez est donc rentrée en France, avec les honneurs et en
bénéficiant d’une couverture médiatique exceptionnelle. Une foule de
journalistes l’attendait lors de son arrivée en France et ceux-ci ont
même été conduits dans une salle de presse du pavillon d'honneur de
Roissy. C'est là qu'arrivent généralement les personnalités importantes
comme les chefs d'Etats.
Laurent Fabius lui-même est allé l’accueillir à l’aéroport,
accompagné de Frédéric Cuvillier, ministre délégué aux Transports à
l'aéroport de Roissy. La mère de Florence Cassez a reçu la visite de
Valérie Trierweiler pendant que l’ancienne détenue a été reçue vendredi
soir (25 janvier) avec toute sa famille à l'Elysée.
Si les médias français s’emballent, les médias Mexicains eux
déchantent en rappelant que Florence Cassez est libre mais
vraisemblablement... Coupable !
On peut évidemment disserter des heures sur le cas Cassez et sa
culpabilité éventuelle ou non. Nous avons le droit de penser que sa
peine est suffisante ou pas. Mais on peut se poser la question suivante :
qu’est ce qui peut justifier de tels honneurs pour une
jeune femme dont la culpabilité semble plus que probable ? Est-ce une
maladresse politique française pour froisser volontairement les
mexicains ? Je frissonne en imaginant l’accueil médiatique
guignolesque que pourrait recevoir les Pussy Riot si celles-ci,
libérées, étaient faites citoyennes d’honneur de Paris voir naturalisées
françaises comme le souhaitent certains responsables politiques de la
majorité actuelle. Je profite de cette tribune pour rappeler à nos élus
que leur travail est en priorité de s’occuper de leur concitoyens et non
pas de faire du Buzz médiatique. Ceux-ci feraient donc bien de
s’occuper en priorité des 2 216 français détenus à l’étranger, dont 7
sont du reste condamnés à la peine de mort.
Enfin il faut dire je crois à nos amis Mexicains la honte qui frappe
les Français. La honte qui frappe la France après l’annulation de
l’année croisée entre les deux pays bien sûr mais pas seulement. Au
moment où Florence Cassez était reçue comme une star du Show-business,
le corps de Yann Desjeux, l’otage français tué sur le site gazier en
Algérie, est arrivé lui aussi à l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle.
La dépouille a été accueillie par la famille du défunt lors d’une
cérémonie intime.
Ce dernier, selon les témoignages d’autres prisonniers, s’est
comporté en véritable héros, notamment en rassurant les otages, en
détournant d'eux l'agressivité des ravisseurs, et en parvenant même à
désamorcer le détonateur de la charge explosive de la ceinture avec
laquelle les terroristes l’avait attaché. Pourtant seule la ministre
déléguée des Français de l’étranger (SIC) avait fait le déplacement.
Yann Desjeux n’a lui pas eu droit ni au pavillon d’honneur, ni à une
couverture médiatique nationale que pourtant, il aurait sans doute bien
plus mérité.
Alexandre Latsa